La nouvelle émission de La Cité a fait un large tour d’horizon de la situation économique de ce printemps 2021 et évoqué le rôle de l’innovation dans les perspectives de rebond. Les Rencontres de l’économie ont donné la parole aux entreprises qui participent à la transformation de l’économie et cherchent des réponses aux défis actuels ainsi qu’aux parties prenantes de La Cité qui accompagnent les entreprises.

Emmanuelle Durand-Rodriguez

Enjeux mondiaux, initiatives régionales

L’urgence climatique et la prise de conscience plus large de la nécessité d’agir ont une influence sur les entreprises et les solutions qu’elles proposent. Dans différents domaines (tourisme, gestion des risques climatiques, énergie) les entreprises se saisissent d’un enjeu, d’une solution à imaginer et elles innovent.

Cathy Sahuc, co-fondatrice et directrice générale de Murmuration : « La crise sanitaire a été un facteur important de la prise de conscience des méfaits du tourisme de masse.  En se basant sur sa démarche scientifique, Murmuration permet de mesurer l’impact de l’activité touristique sur l’environnement grâce à des indicateurs (qualité de l’air, qualité de l’eau, urbanisation) et des outils de pilotages. Pour mettre le facteur environnemental au cœur du modèle économique du tourisme, Murmuration veut devenir leader européen sur le marché du tourisme durable. Dans les prochaines semaines, nous allons publier le premier indicateur de tourisme durable. Chaque pays pourra se positionner par rapport aux autres. »

Jean-Christophe Poisson, co-fondateur et directeur de VorteX.io : « Le contexte de réchauffement climatique augmente le nombre et l’ampleur des crises météorologiques et hydrologiques. Pour prévenir et anticiper les risques d’inondations et de sécheresse, il y a une nécessité de mieux connaitre précisément l’état des cours d’eau. Nous travaillons avec les agences spatiales et les collectivités locales afin de fournir des mesures en temps réel. Notre objectif cette année est de densifier notre réseau de mesures (altimétrie spatiale, par drones ou in situ) et d’élargir notre panel de clients. »

Jean-Marc Bouchet, président de Qair : « Nous vivons une révolution absolument enthousiasmante en matière d’énergie. Je n’aurais pas pu l’imaginer il y a 30 ans, époque où ceux qui s’intéressaient aux énergies renouvelables étaient pris pour des rêveurs. Aujourd’hui, nous sommes crédibles et nous nous apprêtons à résoudre des défis innovants. » L’entreprise engagée à Port-la-Nouvelle dans deux projets d’hydrogène vert et d’éolien flottant en mer est accompagnée par AD’OCC, l’agence régionale de développement économique et soutenue par la Région Occitanie qui a l’ambition de devenir la première région à énergie positive d’Europe à l’horizon 2050. 

Également présente sur le plateau TV des Rencontres de l’économie, la vice-présidente en charge du développement économique, de la recherche, de l’innovation et de l’enseignement supérieur de la Région Occitanie, Nadia Pellefigue a précisé qu’il fallait pour cela « réduire la consommation d’énergie par 3 et augmenter par 2 la production régionale d’énergie renouvelable. Il faut par ailleurs investir sur les mobilités douces, encourager la filière du BTP à être moins énergivore, aider les particuliers à rénover leurs logements avec les éco-chèques. Nous avons également lancé un plan hydrogène vert de 150 millions d’euros et mis en le grand projet de Technocampus qui va tester la mobilisation de l’hydrogène vert pour la motorisation aéronautique et aérienne. »

Deep tech, science et innovation

Les innovations de rupture que constituent les innovations « deep tech » représentent des perspectives importantes de rebond de l’économie. Deux entreprises, Hinfact et Swallis Medical ont illustré le lien réussi entre recherche et création d’entreprise.

Thomas Bessière, co-fondateur et CEO d’Hinfact : « Hinfact a la recherche scientifique dans son ADN ! Parmi les cinq co-fondateurs, trois sont chercheurs en neurosciences et facteurs humains à l’Isae-Supaero. Ils travaillent depuis une vingtaine d’années sur les états mentaux qui ont une influence sur le pilotage ou la supervision de systèmes critiques. Avec la crise, la formation a pris une place encore plus importante dans l’activité des pilotes des compagnies aériennes et Hinfact est en croissance. Nous nous lançons à l’export et explorons actuellement des pistes aux USA, au Moyen-Orient et en Asie. Nous envisageons une levée de fonds et recruterons des ingénieur•es, des post-doctorant•es spécialisé•es en neuroergonomie, facteurs humains, data science ainsi que des développeur•es. Nous recruterons également sur la partie commerciale. »

Linda Nicolini, fondatrice et CEO de Swallis Medical : « L’entreprise développe un dispositif de monitorage, diagnostic et réhabilitation des troubles de la déglutition liés aux AVC ou aux maladies de Parkinson et d’Alzheimer. Constitué de capteurs, de traitement de signaux et d’intelligence artificielle, ce dispositif permet de prendre en charge les patients qui souffrent de ce problème très invalidant qui peut même mener au décès. Après une levée de fonds d’1 million d’euros, nous arrivons à la phase finale d’industrialisation du dispositif -la validation réglementaire- et nous nous préparons à la mise sur le marché ainsi qu’aux premiers tests. Ceux-ci auront lieu au CHU de Toulouse qui nous accompagne depuis le début. La crise sanitaire a démontré le rôle critique de l’industrie du médicament et du dispositif médical. La prise de conscience a été un peu violente tout au long de l’année écoulée mais cela donne aussi au secteur de la santé l’opportunité de rebondir pour construire le futur. »

Pour Nadia Pellefigue, « à tous les niveaux, la santé sera déterminante pour la reprise économique. Elle représente à la fois une filière d’excellence – avec 30 000 chercheurs privés et publics dont beaucoup sont de très haut niveau – et aussi une situation d’urgence pour laquelle nous investissons actuellement plus fortement avec par exemple des campagnes de tests dans tous les territoires grâce à des laboratoires mobiles. Nous avons aussi lancé la création d’Occitanie Protect, une société d’équipements sanitaires 100 % régional. »

Quelles perspectives après une crise historique ?

Nous sommes dans une situation économique marquée à la fois par la nécessité de lutter contre la crise et d’investir pour la transformation de l’économie.

Selon la vice-présidente en charge de l’économie et la recherche, «  il faut à la fois répondre aux besoins à court des termes des entreprises, principalement des TPE et PME vers qui nous mobilisons l’essentiel de nos efforts (un plan exceptionnel de 570 millions d’euros qui nous a permis d’aider  60 000 entreprises) et transformer l’économie pour faire face aux trois crises majeures économique, écologique et sociale. L’absence de masques au printemps 2020 a mis en lumière la nécessité d’une relocalisation industrielle en se dotant à nouveau de capacités de production. Pour cela, nous avons créé l’Agence Régionale des Investissements Stratégiques (ARIS). Portés par la volonté de faire de l’Occitanie la première région de l’innovation en France nous avons également mis en place de nouveaux outils parmi lesquels le fonds d’investissement Ocseed et le portail régional de financement participatif et citoyen, Épargne Occitanie. »

Économie collaborative, une des réponses à la crise

Les Rencontres de l’économie ont été l’occasion d’évoquer une des spécificités de la Cité : rassembler, en un lieu unique et dans une démarche collaborative, de nombreux acteurs du soutien et de l’accompagnement aux entreprises. Dans cet espace alternatif dédié à la création, à l’innovation et au partage d’expériences, AD’OCC, At Home, Nubbo, Région Occitanie, Roselab ont expliqué la spécificité de leurs actions.

Nicolas Schaeffer, directeur général d’ AD’OCC : « L’agence de développement économique de la région Occitanie est partie prenante du projet de la Cité depuis ses origines tout en étant présente sur l’intégralité du territoire régional. Avec la mission d’informer et d’accompagner les entreprises individuellement ou à travers des projets collaboratifs, nous avons une double ambition : la création de valeur et d’emplois ainsi que la structuration et la consolidation des grandes filières régionales. Je pense aux filières matures (l’aéronautique ou l’agroalimentaire par exemple), mais aussi aux filières du futur (la cybersécurité, le véhicule autonome et connecté, l’hydrogène ou l’éolien flottant en mer) et aux filières émergentes comme le sport-tech ou les industries culturelles et créatives. Lorsque que l’agence a été créée en 2018, AD’OCC accompagnait environ 3000 entreprises par an ; aujourd’hui ce chiffre a doublé. »

Anne-Sophie Icard, campus manager d’ At Home à La Cité : « En plus d’un hébergement clés en main tout inclus au sein de La Cité, nous accompagnons les entrepreneurs et leurs équipes dans leur croissance. Intégrer At Home c’est participer à une communauté qui apprend de pair à pair et accélère le développement des entreprises. Historiquement tournés vers le service aux startups, nous avons saisi, avec La Cité, l’opportunité de nous adresser à tous les modèles d’entreprises : startups, PME, ETI ou grands groupes) qui proposent des produits et des services innovants comme par exemple Microsoft, la Compagnie Fiduciaire et la Banque Populaire. Nous avons aussi développé un programme de transformation basé sur l’innovation collaborative et durable avec nos partenaires EDF, Pierre Fabre ou Spring Lab. »

Anne-Laure Charbonnier, directrice générale de Nubbo : « Au sein de la Cité, Nubbo est la structure d’incubation et d’accélération des porteurs de projets et des jeunes entreprises innovantes. Nous accompagnons des porteurs de projet ou des entreprises tout récemment créées, de tous secteurs d’activités et de tous domaines technologiques avec quelques dominantes, notamment la robotique, l’intelligence artificielle ou encore le new space. Nubbo est également à l’initiative de la création d’une toute nouvelle société de financement en pré-amorçage ou amorçage, Ocseed dont la vocation est de combler un trou dans la chaîne de financement, entre la phase de sortie d’incubation ou d’accélération et le moment où les entreprises sont suffisamment structurées pour intéresser les investisseurs. Nos actionnaires ont souscrit au capital d’Ocseed à hauteur de 5 millions d’euros, ce qui va permettre de financer 20 à 25 projets sur les 5 années à venir. »

Lucie Schmitz, associée et directrice générale adjointe de Manatour : « L’industrie change. Elle est de plus en plus locale mais fonctionne aussi avec des partenaires extra locaux. Manatour s’inscrit dans cette transformation à travers le Roselab qui est un parc éco-industriel mettant en avant l’ingénierie écologique. »  Selon Antoine Ruiz-Scorletti, responsable et manager du Roselab « on est un maker space, un hacker space, un atelier artisan, on est aussi une usine 4.0. Ce qui est important pour nous c’est d’être le trait d’union entre l’artisanat et l’industrie. Grâce aux  machines et outils à disposition, nous permettons à une startup, un indépendant ou un artisan de venir tester une idée ou à une PME ou un grand compte de se lancer dans l’innovation collaborative. »

Nadia Pellefigue, vice-présidente en charge du développement économique, de la recherche, de l’innovation et de l’enseignement supérieur de la Région Occitanie : « La diversité des acteurs que l’on trouve à La Cité montre notre volonté de nous inscrire dans l’intelligence collective. Ces acteurs ce sont AD’OCC, Nubbo, At Home et Roselab mais aussi d’autres parties prenantes comme French Tech Toulouse, le Club de la Presse Occitanie ou la Team France Export. Et donc ce lieu, La Cité, est au service de la transformation du territoire. »